[#INTERVIEW] Thibaut G. / Chef de Projets AMOA

Appui au Pilote MOA Génie Civil

Client : SNCF

Mission : Appui au Pilote MOA Génie Civil du département Patrimoine, Exploitation et Projets

Nature du projet : Régéneration d’infrastructure ferroviaire.

Intervenant Aptitude : Thibaut G.

Spécificités du projet

Contexte : Le pilote MOA gère près de mille opérations de régénération d’infrastructure. L’objectif de la mission n’est pas de s’intéresser à une mission ou une information en particulier, mais à la vision globale. Le but de la mission est d’assurer les grands enjeux (délai, maîtrise des coûts, performances) avec une vision globale programme.

Difficultés principales :

1. La première est d’ordre financier. Le financement par l’état des opérations de régénération ne prends pas en compte l’évolution de l’indice TP01. Le budget alloué est le même d’une année sur l’autre, mais l’inflation renchérit chaque projet, ce qui amène souvent à arbitrer entre deux projets de régénération qui auraient pu être menés en parallèle quelques années plus tôt.

Par exemple : le coût de l’énergie a fortement grimpé. Le prix de l’acier a pris 50 % depuis 2021 et le cuivre 28 %. Chaque projet faisant appel à ces ressources est nécessairement beaucoup plus onéreux qu’il l’aurait été il y a peu.  

2. On se heurte aussi à de gros problèmes de ressources humaines. Pour effectuer les travaux d’une part, et de bureau d’étude, pour produire les livrables essentiels au bon déroulé du projet. L’absence de ces documents induit inévitablement des dérives de calendrier et budgétaires dans chacun des projets concernés.

Objectif et bénéfices : Le but de la mission est donc d’optimiser les dépenses et d’effectuer les choix les plus judicieux pour régénérer les infrastructures vitales au bon fonctionnement du réseau pour que les usagers connaissent la meilleure performance possible.  

Q: Thibaut, quel est votre profil ? 

[Thibaut] : J’ai une formation et une expérience de contrôleur financier des projets. Pendant des années, ma mission a consisté à m’assurer que les projets sous ma supervision respectaient leur budget, et à m’assurer de fournir des prévisions fiables lors du reporting trimestriel.

Aujourd’hui, j’aide à l’instruction des dossiers, c’est-à-dire à la production des documents de cadrages essentiels sur le terrain pour le respect des coûts, des délais, de la performance opérationnelle et de la programmation physique.  Le pilote MOA reçois de nombreux dossiers assortis des conditions qu’ils doivent remplir et nous devons nous assurer que les solutions proposées sont adaptées au contexte. Lorsque ce n’est pas le cas, nous formulons des propositions.

 

Q: Est-ce qu’il y a des problèmes ou erreurs systématiques dans ces dossiers ?

[Thibaut] : Non, on n’y trouve pas de biais systématique. Les erreurs que l’on retrouve sont soit des oublis budgétaires soit des excédents dus à des excès de prudence.  

 

Q: C’est-à-dire ? 

[Thibaut] : Les oublis sont le plus souvent liés à des changements récents de réglementation ou des augmentations tarifaires brutales. Par exemple, des mesures environnementales sont devenues obligatoires récemment, et il arrive qu’elles ne soient pas comprises dans les budgets que l’on voit passer. De même, les augmentations du prix de matières premières ne sont pas toujours répercutées de manière juste.    

A l’inverse, lorsque des responsables de projets cherchent à se prémunir contre de futures hausses ou ne sont pas au fait de toutes les réglementations, ils peuvent errer du côté de l’excès de prudence et sur-estimer leurs budgets. C’est à nous de corriger le tir dans les deux sens pour garantir des projets sans heurts, et un maximum de réalisation par année.    

Un projet surestimé pose un problème puisque le budget non consommé est perdu. On ne peut pas le récupérer l’année suivante, et on subit un manque en régénération. Et un budget sous-estimé cause une double peine. Non seulement le projet ne peut pas être terminé dans l’année, mais les coûts répercutés l’année d’après le sont au détriment d’autres qui coûteront encore plus cher les années suivantes.

 

L'objectif de l'instruction de dossiers de régénération d'infrastructures est d'optimiser le budget et le séquençage pour garantir un patrimoine robuste à financement constant.

Q: De quel montant arrivez-vous à corriger ces budgets? Vos corrections sont-elles fiables? 
 
[Thibaut] : Nous n’avons pas de mesure précise projet par projet de l’impact de notre travail. Mais j’estime le bénéfice à 5%. Ça paraît peu, mais 5% de projets réalisés tous les ans, c’est un bénéfice significatif pour la société.
 
Et, oui, nos estimations sont fiables. Les écarts sont liés à des découvertes de dernier moment, comme la présence d’artefacts précieux sur le lieu d’un chantier, qui n’auraient pas été détectés par les recherches archéologiques, par exemple.
 
La modification des conditions de réalisations (manque de personnels, appels d’offres infructueux, retards plannings…) est la première cause d’écarts (même si cet écart est couvert en partie par une provision pour risque issu d’une analyse des risques).
 
Q: Et sur les aspects non budgétaires, quel est votre impact? 
 
[Thibaut] : Tout ce que nous réalisons a un impact sur le budget, même s’il ne s’agit pas de travaux financiers. Nous travaillons par exemple beaucoup sur l’optimisation des plannings, la massification des chantiers (par exemple, la modélisation de toute une voie pour faire les meilleurs arbitrages entre divers chantiers sur la voie) et les méthodes et outils de travail permettant la plus grande efficience sur le terrain. Toutes ces actions ont un effet financier positif et permettent de réaliser le plus de régénération possible dans un contexte donné et à financement public constant.