Optimisme prudent
Les crises se suivent, mais ne se ressemblent pas. Ou, plutôt, la résilience du secteur qui les subit semble plus forte au fur et à mesure que les vagues déferlent. A peine sortie des restrictions sanitaires, voilà l’industrie ferroviare plongée dans l’enfer des coûts energétiques. Des lignes fermeront, des pas en arrière annuleront des pas en avant. Mais le secteur est non seulement optimiste, mais investit pour améliorer encore ses performances et sa neutralité carbone. Et que dire des chemins de fer Ukrainiens, qui remettent en état des lignes et assurent à nouveau des liaisons, alors que les missiles ne cessent de tomber ? L’avenir reste incertain à bien des titres, mais aller de l’avant, en dépit des mauvaises nouvelles et du manque de soutien occasionnel, semble la doctrine d’un milieu depuis toujours, dans son ensemble, dévoué au service public.
L'actu de ce numéro
Gros titres
- Réseau ferroviaire : un patron limogé, des questions en suspens. Matthieu Chabanel devrait remplacer Luc Lallemand à la tête de SNCF Réseau, suite au limogeage de ce dernier par l’état suite à ses remarques sur les insuffisances budgétaires de la société. Nouvelle illustration de la complexité du financement du développement de ferroviaire en France. Une loi de programmation ferroviaire pluriannuelle pourrait apporter plus de visibilité.
- Transport ferroviaire : « Créer ou remettre en circulation des petites lignes, c’est rétablir un lien entre ruraux et urbains » Jean-Marc Esnault, directeur du campus agricole The Land, rappelle les gains de PNB et les enjeux stratégiques de l’investissement ferroviaire, en se basant sur une France à la sortie de la guerre de 1870.
- L’industrie ferroviaire affiche sa confiance. Forte de sa résilience pendant la crise sanitaire, elle mise aujourd’hui sur une croissance annuelle de 3%, et des marchés en forte croissance en Afrique/Moyen-Orient et en Europe de l’Est. Voir aussi : À Berlin, le monde du ferroviaire optimiste malgré les crises (et l’hydrogène comme élément porteur de croissance).
- Pour autant, le secteur ferroviaire européen appelle à l’aide face à l’augmentation des prix (dans certains pays membres, le prix de la facture énergétique menace de devenir intenable). Voir aussi : La région Grand Est évoque des fermetures de lignes liées à la flambée des prix de l’électricité.
- Aides d’État : la Commission autorise un régime français de 450 millions d’euros visant à soutenir le transport ferroviaire par wagons isolés. A l’heure où le fret ferroviaire craint de céder encore du terrain face au camion, cette option permettrait un report modal de petites quantités de marchandises vers le train. Un double bénéfice pour l’environnement et la mobilité routière. Voir aussi : L’objectif de doubler la part du fret ferroviaire mal engagé, dit un opérateur.
L’international
- L’Allemagne s’inquiète pour ses infrastructures après un sabotage ferroviaire. Alors que la guerre en Ukraine tourne pour l’instant à la déroute pour la Russie, elle devient la première suspecte des sabotages en série qui frappent l’Europe. L’Ukraine, quant à elle, rouvre la liaison ferroviaire de l’Est malgré les missiles | AFP.
- (Suisse) Une nouvelle technologie ferroviaire pourrait-elle transformer le projet ArcExpress? La compagnie du chemin de fer Montreux Oberland Bernois a développé un bogie à écartement variable. Elle permettrait de relier directement des villes qui nécessitaient auparavant un changement.
- (Belgique) Budget fédéral: vers une fermeture de 700 km de lignes ferroviaires ? SNCF Réseau n’est pas seule à tirer la langue. Infrabel enviage la fermeture de 20% de ses lignes si le gouvernement de répond pas à ses attentes budgétaires.
- Rail Baltica : la LGV qui détourne les pays baltes de la Russie et de leur passé soviétique. Potentiellement très rentable en dépit de son coût de 5.8Md€ et des légitimes inquiétudes financières associées, ce projet techniquement très avancé devrait créer 37 000 emplois et resserrer les liens au sein de la CEE, et harmoniser ses écartements de voies.
- L’Allemagne s’accorde sur un nouveau billet unique pour les transports régionaux. Le succès de l’expérience du billet mensuel estival à 9€ incite les autorités à continuer le reste de l’année à un tarif moins couteux (en subventions) pour le pays, mais aussi aborable que possible. Et l’Allemagne n’est pas la seule à donner dans l’incitation aux transports en commun : Inflation : l’Espagne va maintenir ses passes ferroviaires gratuits en 2023.
- Trains : une nouvelle compagnie low cost en Espagne. Depuis l’arrivée de Ouigo dans le pays, les tarifs des lignes concernées ont baissé de moitié et le trafic a augmenté de 13%. Iryo, la petite nouvelle sur ce marché, devrait accelérer ce mouvement. Les trajets se feront à bord de trains ETR 1000 qu’Iryo qualifie de « plus rapides, modernes et écologiques d’Europe ».
- Espagne – Maroc : Le projet du tunnel ferroviaire sous-marin prend forme. Le projet a connu maintes vicissitudes au fil des ans. Mais, ressorti de ses cartons et avec une promesse de financement d’études – jugé faible par les observateurs – et des avancées technologiques facilitantes, il semble maintenant destiné à voir le jour.
- Accord sur une ligne ferroviaire reliant les Emirats à Oman. 3Md$ seront investis dans une ligne de 300km reliant les deux pays, et une coentreprise à parts égales gèrera les différentes phase du projet, jusqu’à l’opération.
- Nigeria : un budget de 193 millions USD prévu pour les projets ferroviaires en 2023. Réhabilitation de lignes, construction de gares, et refinancement après le retrait de la Chine, au programme.
- Le projet ferroviaire Thaïlande – Laos devrait être opérationnel mi-2023. Quatre allers-retours quotidiens sont prévus entre les deux pays, et les formations pour les opérateurs ferroviaires, le personnel de maintenance et les agents apparentés sont en cours.
Régions
- Ferroviaire : l’Etat relance la mise en concurrence des lignes Nantes-Bordeaux et Nantes-Lyon. L’exploitation des lignes de trains d’équilibre du territoire (TET) ou Intercités Nantes-Lyon et Nantes-Bordeaux avait l’objet d’une première procédure de mise en concurrence en 2019, mais la crise sanitaire y avait mis un frein.
- Initialement prévue en 2022, la ligne ferroviaire directe Londres-Bordeaux pourrait finalement voir le jour d’ici 2027. Prenant pour modèle la réussite de la ligne directe Londres – Amsterdam, Getlink relance une idée vieille de 3 ans et envisage même une liaison avec la Côte d’Azur.
- L’État et SNCF Réseau s’engagent pour la réduction du bruit ferroviaire. Aucune solution de transport n’est 100% bénéfique et le bruit des trains en fait une source de grogne fréquente. La région Bourgogne-Franche-Comté se lance dans la chasse aux points noirs sur ce sujet.
Entreprises
- Alstom va livrer 17 trains Coradia Stream à l’Autorité Ferroviaire Roumaine (ARF) La commande comprend 15 années de services de maintenance. Les rames sont équipées d’ERTMS de niveau 2 et respectent à la fois les normes européennes (EN) et les spécifications techniques d’interopérabilité.
- Henri Poupart-Lafarge, PDG d’Alstom : « Nous avons quatre ans d’avance dans le train à hydrogène » Désormais n°2 mondiale, l’entreprise table sur 5% de croissance annuelle jusqu’en 2025 et mise beaucoup sur la transition écologique. Voir aussi : Un train à hydrogène d’Alstom parcourt 1.175 kilomètres sans ravitailler (essai en Allemagne, où ces trains sont en test depuis 2018).
- Alstom et Saudi Railway Company vont développer des trains à hydrogène pour l’Arabie saoudite. Autre pays, autre projet, mais toujous dans l’hydrogène et avec Alstom. Prèsent en Arabie saoudite depuis 70 ans, le géant va aider le pays à atteindre ses objectifs de neutralité carbone au moyen de projets ferroviaires développés en collaboration avec Saudi Arabia Railways.
- Le secteur ferroviaire s’organise pour rendre le train plus écologique et accessible. L’association Care (« Compétitivité, Accompagnement, Rail, Emploi »), a sélectionnédes PME pour stimuler les innovations qui diminueront les coûts d’exploitation sur un réseau vieillissant et amélioreront encore plus les vertus écologiques du transport ferroviaire.
Et aussi..
- EN IMAGES. Dans les coulisses du chantier de contournement ferroviaire des sites industriels de Donges. Pour les amateurs de chantiers ferroviaires 🙂 Celui-ci divise les risques locaux par 10.
- Dà Nang – Quy Nhon : embarquez dans la voiture ferroviaire de luxe The Vietage. Non, il n’y a pas que l’Orient Express 🙂